Bientôt, le Parlement Européen aura à voter le rapport Medina, validé le 20 janvier par la commission des affaires juridiques. Ce rapport, porté par le député espagnol du même nom, est une véritable abomination. C’est une dangereuse attaque menée contre les libertés individuelles et le droit fondamental des citoyens à la protection de leur vie privée.
En effet, le rapport fait l’éloge de la riposte graduée et de la mise
en place de dispositifs de filtrage d’Internet. C’est-à-dire, le
développement de solutions techniques destinées à surveiller les
moindres faits et gestes de la totalité des utilisateurs, dans le seul
but de détecter quelques activités défiant la toute puissance du
copyright. Ce sont les majors elles-mêmes qui jouiront de l’accès total
à vos échanges sur la toile, avec le support des fournisseurs d’accès
(FAI), contraints et forcés de collaborer.
Cela correspond au fait qu’une entreprise viennent systématiquement
chez vous ouvrir votre boîte aux lettres, afin de lire l’intégralité de
votre courrier, analyser ensuite si rien n’est illégal dans votre
correspondance, vous dénoncer si tel est le cas, ou bien refermer le
tout comme si de rien n’était, si vous êtes innocent. Au revoir la
présomption d’innocence et la confidentialité.
Et ceux qui comprennent un tant soit peu le fonctionnement d’Internet,
savent très bien qu’appliquer ce genre de procédé de surveillance
totale est irréalisable, à moins d’y consacrer d’infinies masses
d’argent.
Comment justifier alors une telle position et une telle débauche de
moyens ? Ceux qui défendent la riposte graduée et le contrôle
d’internet présupposent-t-ils que derrière chaque internaute se cache
un violeur de copyright en puissance ? La liberté, pour l’industrie du
divertissement de préserver bec et ongle une conception archaïque du
droit d’auteur, est-elle plus fondamentale que le droit à la protection
de la vie privée pour chaque citoyen ? Où y a-t-il d’autres intérêts à
accéder légalement à toutes vos activités numériques ?
Évidemment, la propriété intellectuelle est primordiale, mais l’incapacité à faire évoluer la conception du droit d’auteur en harmonie avec les nouvelles technologies, est une réelle menace contre l’innovation et la créativité. Cela témoigne plus d’une rigidité à évoluer, que d’une défense légitime de ses droits. C’est peut-être aussi une volonté politique de tenter de contrôler un terrain qui leur échappe et qu’ils ne comprennent et ne maîtrisent pas.
Le Président Sarkozy a annoncé vouloir mettre en œuvre tous les moyens
nécessaires à l’adoption définitive d’Hadopi en mars prochain. Cela
paraît tout à fait cohérent dans sa logique de privilégier les
puissants plutôt que l’ensemble des parties-prenantes, ce n’est pas
l’intérêt des citoyens qui est pris en compte, pas plus celui des
artistes ou des petits producteurs, mais sans aucun doute celui des
majors.
Légitimer la violation du respect de la vie privée et élaborer une
stratégie de société de surveillance totale et de traçage à travers
Internet, au nom de quelques mp3 semble quelque peu particulier. Mais
si on se replace quelques mois en arrière et qu’on s’intéresse au
soulèvement populaire qu’avait provoqué le fichier EDVIGE, déjà une
tentative de nous déposséder par la loi de notre vie privée, on
comprend que l’échec d’EDVIGE pousse le gouvernement aujourd’hui à
attaquer plus insidieusement. En effet, avec la loi Création et
Internet, c’est vos moindres clics, vos moindres visites, vos moindres
échanges que des entreprises privées auront en toute légalité la
possibilité de surveiller. C’est un pas de plus dangereux vers un
régime fasciste, offrant au roman de George Orwell un caractère
prophétique.
C’est pourquoi je désire m’engager encore plus fortement dans le combat européen pour défendre nos libertés, aider les députés progressistes à comprendre les véritables enjeux et surtout en finir avec cette spirale liberticide.
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